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LE RETOUR DU CANNIBALE: GEDEON KYUNGU, BRAS ARME DE KABILA, POUR ÉBRANLER TSHISEKEDI ?

Dans les riches savanes du Grand Katanga, une figure sanguinaire refait surface, tel un spectre du passé : Gédéon Kyungu Mutanga, le seigneur de guerre cannibale, amnistié par un régime complice et aujourd’hui suspecté de semer le chaos pour saper l’autorité de Félix Tshisekedi.

Né dans les entrailles de la République démocratique du Congo, ce personnage dit « Mai-Mai », a émergé à la fin des années 1990 comme un prétendu défenseur des communautés locales contre les invasions étrangères, lors de la Première Guerre du Congo.

Mais rapidement, ses milices ont mué en machines de terreur, semant la mort et la désolation dans le « triangle de la mort » – Pweto, Mitwaba, Manono – entre 2002 et 2006.

Des centaines de civils massacrés, 150 000 âmes chassées de leurs terres, des viols systématiques, des mutilations rituelles et même des actes d’anthropophagie pour briser les esprits : voilà le legs barbare de Gédéon, documenté par des témoins lors de son procès choc en 2007-2009.

Condamné à mort pour crimes contre l’humanité par un tribunal militaire de Lubumbashi en mars 2009, aux côtés de vingt complices, Gédéon semblait destiné à pourrir en cellule. Mais le destin – ou plutôt les manigances politiques – en a décidé autrement.

En septembre 2011, ses miliciens lancent une attaque audacieuse sur la prison de Kassapa, libérant leur chef dans un bain de sang qui laisse les gardes exsangues. Une récompense de 100 000 dollars est promise pour sa capture, mais Gédéon renaît de ses cendres, s’alliant aux séparatistes Bakata Katanga pour prôner la sécession de cette province riche en cobalt et cuivre. De 2011 à 2016, ses forces ravagent à nouveau les campagnes, exacerbant tensions ethniques, meurtres et déplacements forcés, tout en alimentant l’instabilité qui profite aux puissants.

C’est ici que la complice ombre de Joseph Kabila plane avec une intensité glaçante.

En octobre 2016, Gédéon se rend aux autorités à Malambwe, flanqué d’une centaine de combattants, sous prétexte de pacifier la région. Au lieu de croupir en geôle pour expier ses horreurs, il est accueilli en héros à Lubumbashi, avec fanfare militaire et accolades du gouverneur du Haut-Katanga. Placée en résidence surveillée – une farce d’impunité –, cette mansuétude est vue par Human Rights Watch et d’autres observateurs comme un pacte occulte avec le régime Kabila, via le général Numbi.

À l’époque, Kabila manœuvre pour prolonger son mandat au-delà des limites constitutionnelles, face à une opposition bouillonnante. Gédéon, ce monstre recyclé, sert d’outil : intimider les dissidents, stabiliser le Katanga minier et contrer les critiques, en échange d’une amnistie de facto.

Des voix comme celle de feu Gabriel Kyungu wa Kumwanza accusent ouvertement Kabila d’instrumentaliser ce criminel pour semer la rébellion dans l’ex-Katanga, renforçant ainsi son emprise. Cette alliance tacite n’est pas anodine : elle illustre comment Kabila, maître des ombres, protège les seigneurs de guerre pour perpétuer son influence, même au prix du sang congolais.

Mais les vents tournent avec l’arrivée de Félix Tshisekedi au pouvoir en 2019. En mars 2020, Gédéon s’évade une seconde fois de sa résidence surveillée, lors d’une offensive meurtrière de ses miliciens qui fait 31 morts parmi les siens et blesse des forces de sécurité. Tshisekedi ordonne son arrestation immédiate, marquant une rupture avec l’impunité kabiliste. Gédéon disparaît dans la brousse, mais les sanctions internationales s’abattent :

liste noire de l’ONU en 2018 pour violations des droits humains, gels d’avoirs par les États-Unis la même année et mesures consolidées de l’UE jusqu’en 2025.

Et voilà que, le 24 septembre 2025, Gédéon resurgit dans le territoire de Mitwaba, Haut-Katanga, brandissant le drapeau de la « République du Katanga » – un cri sécessionniste qui ravive les fantômes de la division.

Accompagné de miliciens armés, sous le pseudonyme « Kambo » ou « général Gédéon », il menace de relancer les atrocités Bakata Katanga dans une région déjà minée par les conflits communautaires.

Cette réapparition, survenant ces jours-ci, n’est pas un hasard isolé.

Elle coïncide avec le retour fracassant de Joseph Kabila lui-même en mai 2025, atterrissant dans le Goma rebelle tenu par le M23, pour fustiger le « régime tyrannique » de Tshisekedi et promettre sa chute. Accusé par Kinshasa de soutenir les rebelles et d’orchestrer une déstabilisation depuis l’exil, Kabila – via ses réseaux persistants – pourrait bien réactiver d’anciens pions comme Gédéon pour enflammer le sud-est, exploiter les richesses minières et miner l’autorité de son successeur. Des analystes voient dans ces mouvements synchronisés une stratégie concertée : balkaniser la RDC, attiser les insurrections pour affaiblir Tshisekedi, au risque d’un bain de sang généralisé.

Ajoutant une couche de machiavélisme à cette toile, le M23 – ce proxy rwandais qui a capturé Goma et Bukavu en juin 2025 – se heurte désormais à un mur : les accords de paix en cours, comme celui signé à Washington entre la RDC et le Rwanda le 27 juin, freinent son avancée, malgré des combats persistants et un refus du groupe de reconnaître l’entente.

Simultanément, l’organisation croissante des FARDC, renforcée par le soutien de MONUSCO et SAMIDRC, ainsi que par des piliers d’intégration militaire issus des accords, élève un rempart contre l’expansion rebelle à l’est.

Bloquées dans leur élan, les forces de déstabilisation de la RDC – potentiellement orchestrées par des vestiges du kabilisme et leurs alliés régionaux – pivotent vers le Grand Katanga, ce cœur économique vulnérable, pour ouvrir un nouveau front de chaos.

Cette bascule donne une signification plus profonde aux déclarations récentes du général Eddy Kapend, légende de l’armée congolaise et commandant de la sécurité dans les quatre provinces katangaises. Le 21 septembre 2025, il minimise les avancées du M23 tout en alertant sur le danger imminent au Katanga, avertissant les « ennemis de notre pays » que la région riche en minerais ne tombera pas, soulignant ainsi son importance stratégique comme bouclier vital pour la souveraineté nationale.

Dans ce contexte, le retour de Gédéon n’est plus une simple résurgence : c’est un coup de poignard calculé, peut-être commandité depuis les coulisses par Kabila et son homme de liason qui est John Numbi, pour transformer le Katanga en poudrière et ébranler Tshisekedi de l’intérieur.

Les appels à une intervention rapide des forces congolaises fusent, mais dans ce jeu d’échecs mortel, la question persiste: Gédéon est-il le bras armé d’un Kabila revanchard, prêt à tout pour reconquérir l’influence perdue?

Le Katanga, cœur économique de la RDC, pourrait bien devenir le théâtre d’une déstabilisation orchestrée, où l’impunité d’hier nourrit les flammes d’aujourd’hui.

Soyons vigilants !

Eugène Diomi Ndongala,

Démocratie Chrétienne.