La suspension brutale de l’exploitation artisanale met le feu aux poudres au Katanga.
Le 19 décembre 2025, le ministre des Mines, Louis Watum Kabamba, signe l’Arrêté n° 00964, suspendant immédiatement le traitement et la commercialisation des minerais cuivre et cobalt issus de l’exploitation artisanale sur tout le territoire congolais.
Objectif affiché : lutter contre la fraude, les envahissements illégaux des concessions industrielles et renforcer la traçabilité, en alignant la filière sur le monopole de l’Entreprise Générale du Cobalt (EGC).
Mais dans le grand Katanga, cœur battant de cette production, la mesure tombe comme un coup de tonnerre. À Kolwezi et dans le Lualaba, où des centaines de milliers de familles survivent grâce à l’artisanat minier – directement ou indirectement –, l’arrêt brutal des activités crée un vide économique abyssal.
Sans revenus du jour au lendemain, les creuseurs artisanaux se retrouvent littéralement sans aucune ressource, plongés dans une précarité extrême.
Pourtant, le Code minier révisé de 2018 prévoit explicitement des Zones d’Exploitation Artisanale (ZEA) pour encadrer et sécuriser cette activité légale. Des promesses récurrentes – 64 ZEA identifiées au Lualaba, répétées par le ministre lui-même en novembre 2025 – restent lettre morte.
Le processus d’octroi traîne, les sites viables manquent, et les creuseurs, coincés dans l’informel, n’ont nulle part où aller.
Cette absence criante d’alternatives transforme une mesure « conservatoire » en « catastrophe sociale ».
Ce 27 décembre 2025, la colère explose. À Kolwezi, les creuseurs descendent massivement dans les rues : routes bloquées, quartiers paralysés (Kanina, Cité Gécamines, Luilu, « 5 ans »).
Affrontements violents avec les forces de l’ordre, tirs à balles réelles, travailleurs des entreprises industrielles lapidés, vendettas contre les tenues d’entreprise dans les cités. Des sources locales font état d’au moins deux morts parmi les manifestants, de nombreux blessés et un climat de terreur généralisé. Le risque d’un soulèvement plus large plane, alimenté par un désespoir viscéral : pour ces familles, l’artisanat n’est pas un choix, c’est la survie.
Légalement défendable, cette décision manque cruellement de préparation et d’accompagnement.
Sans ZEA opérationnelles – pourtant obligatoires par la loi –, elle condamne des centaines de milliers de Congolais à la misère immédiate, risquant d’embraser des régions entières.
Et pourtant, à l’époque où j’étais Ministre des Mines, en 2004, j’avais mis un place une ZEA pilote pour les creuseurs artisanaux, conformément au Code Minier. Malheureusement, mon successeur céda illégalement la ZEA que je venais de mettre en place à un exploitant chinois comme mine privée, privant les creuseurs artisanaux de cette zone d’exploitation artisanale légale et légitime.
Au jour d’ hui, aucune ZEA n’ est en place.
Un dialogue urgent s’impose : revoir la mesure, accélérer les ZEA viables et proposer une transition humaine.
Faute de quoi, la lutte contre la fraude pourrait coûter bien plus cher que prévu – en vies humaines et en stabilité.
La situation reste explosive ; le Katanga retient son souffle et la fédération de la Démocratie Chrétienne du grand Katanga m’a fait état d’une situation qui risque de devenir explosive et incontrôlable, à cause des centaines de milliers de jeunes privés brutalement de revenu, à qui l’ état n’offre aucune alternative légale, bien prévue par le code minier.
En ce moment, il est plus qu’inopportun, pour l’état congolais, de pousser à bout la jeunesse katangaise.