Katanga : l’insécurité dénoncée / La Libre Belgique 05.04.13
Katanga : l’insécurité dénoncée
Marie-France Cros, La Libre Belgique
Mis en ligne le 05/04/2013
Des ONG mettent en cause “certains partis” et accusent des personnalités.
Congo-Kinshasa
Onze ONG du Katanga ont rédigé, le 26 mars dernier à Lubumbashi, un « Rapport circonstanciel sur la situation sécuritaire dans la province du Katanga » , affectée, ces derniers mois, par une poussée des attaques de groupes armés « maï maï » (ayant recours aux fétiches) ou indépendantistes.
Après un aperçu historique de ces différents groupes armés, le texte détaille l’incursion dans la capitale du cuivre, Lubumbashi, le 23 mars dernier, d’environ 300 hommes du groupe indépendantiste Bakata Katanga. Pris pour cibles par la garde présidentielle, ceux-ci auraient perdu 22 combattants, tués, et une quarantaine ont été blessés. Quelque 240 insurgés se sont rendus à la Monusco (Mission de stabilisation de l’Onu au Congo) et 200 ont été transférés à Kinshasa, les mineurs d’âge restant sur place.
Police et Banque centrale
Le rapport souligne que « plusieurs officiers » de l’armée, de la police et des renseignements « ont reconnu » auprès des enquêteurs des ONG « qu’ils étaient au courant de l’avancée de ces insurgés mais que l’ordre de les empêcher d’atteindre [ ] Lubumbashi ne leur a pas été donné » . Il ajoute que « le 21 mars 2013, un groupe de Bakata Katanga qui s’était évadé de l’ANR (services de renseignements) s’était réfugié dans la ferme nommée Beijing appartenant au général John Numbi (le chef national de la police, suspendu) et après vérification, aucun ordre de les maîtriser n’a été donné ».
« Plusieurs assaillants » ont avoué aux enquêteurs des ONG « que le chef Ferdinand Kazadi Ntanda Imena Mutombo (chef notoire des Bakata Katanga) était en contact régulier avec le général John Numbi qui le fournirait en armes et munitions ainsi qu’en stratégies d’attaques ».
En outre, ajoute le rapport sur leur source de financement, les assaillants interrogés par les enquêteurs ONG « ont aussi reconnu que le gouverneur de la Banque centrale » du Congo, « M. Masangu Mulongo est l’un de leurs pourvoyeurs. Ils ont toujours reçu des nouvelles coupures de billets de banque de 10 000 et 20 000 francs congolais à titre d’encouragement pour les différentes attaques opérées » . Jean-Claude Masangu Mulongo, 59 ans, est gouverneur de la Banque centrale depuis 1997, après l’arrivée de Laurent Kabila au pouvoir, dont il était proche. En mai prochain, son dernier mandat doit prendre fin. Comme le général Numbi, le chef de la police congolaise, M. Masangu est d’ethnie luba du Katanga et considéré comme un proche du président Joseph Kabila – ce qui explique la consternation qu’a jeté à Kinshasa la publication du rapport de la société civile katangaise.
Le lundi de Pâques, l’avocat du général John Numbi a organisé une conférence de presse dans la capitale pour récuser l’accusation contre son client. Me François Kande a demandé l’ouverture d’une enquête judiciaire pour établir les responsabilités dans cette affaire « dès lors que le rapport de la société civile porte ombrage au général John Numbi, salit sa personne et son honneur » . Et d’ajouter, selon Radio Okapi : « Nous voudrions que les gens qui auraient forcé les uns et les autres à écrire des faits faux soient poursuivis. »
Durant le week-end de Pâques, les notables katangais ont « condamné fermement les actes de barbarie et de subvention ( sic ) commis le 23 mars « , qu’ils attribuent « aux gens assoiffés de pouvoir », indique l’agence de presse officielle ACP. Ils ont aussi invité Kinshasa, ajoute ACP, à « assurer une juste rétribution au Katanga en tenant compte de son apport important au budget national » , soit la revendication des autonomistes.




