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GEOCRIMINALITE : QUAND LE CRIME DEVIENT UNE ARME GEOPOLITIQUE

Oui à la paix mais le crime organisé doit être démantelé et sanctionné, au moins par la justice transitionnelle

Le 27 juin 2025, la République Démocratique du Congo et le Rwanda ont signé un accord historique, négocié sous l’égide des États-Unis, pour mettre fin à la crise du M23 dans l’est du Congo. Retrait des troupes, désarmement, coopération.

Mais derrière les applaudissements diplomatiques se cache une réalité bien plus sombre, qui devra aussi être prise en compte maintenant, surtout à l’occasion des discussions qui se tiennent à Doha.

Le conflit est en effet gangréné par le crime organisé.

QUAND LA REBELLION DEVIENT UN BUSINESS

Oubliez l’image romantique du rebelle luttant pour une cause politique noble, à la Che Guevara, comme Nangaa ou Joseph Kabila voudraient nous faire croire…

Le M23 n’est pas une simple milice ; c’est une machine criminelle bien huilée.

En s’emparant de territoires riches en minerais, le groupe pille le coltan et l’or, transformant le chaos en jackpot : ils n’ont rien à cirer du bien être des congolais soumis à cette occupation violente, encore moins des fonctionnaires impayés ou de la bonne gouvernance.

Selon l’Atlantic Council, rien qu’en 2024, le M23 a exporté au moins 150 tonnes de coltan vers le Rwanda – de quoi représenter 7 à 10 % de la production mondiale annuelle de la RDC. Le prix humain ? Plus de 11.000 morts en 2025.

Pendant que les communautés s’effondrent, les profits s’envolent.

Ce conflit n’est plus une guerre idéologique, avec un prétendu soubassement de recherche de bonne gouvernance ; il a été détourné par des intérêts criminels. Rebelles, milices et même certains acteurs politiques se servent dans ce buffet sanglant. Et les discussions de Doha ne peuvent pas ignorer cela.

LE RWANDA, MAITRE DU JEU CRIMINEL

Et si le crime était une arme d’État ? C’est ce qu’on appelle la «GEOCRIMINALITE », concept prôné par la « Global Initiative » contre le crime organisé trans-national : l’utilisation délibérée de réseaux criminels pour servir des objectifs stratégiques.

Le Rwanda excelle dans ce domaine. En soutenant le M23, une rébellion de proxy, Kigali sécurise des intérêts économiques et impose son influence sur son voisin, tout en jouant la carte de l’innocence et de la victimisation. Les experts de l’ONU ne mâchent pas leurs mots : des milliers de soldats rwandais opèrent en RDC et des armes modernes affluent vers le M23. Le Rwanda crie au démenti, affirmant ne partager que des renseignements. Mais les preuves s’accumulent, implacables, comme celle publiées récemment par la chaine américaine NBC.

Pourquoi ce double jeu ? Officiellement, il s’agit de neutraliser les FDLR, milice hutu issue du génocide de 1994. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Les forces rwandaises, main dans la main avec le M23, ne se contentent pas de traquer leurs ennemis, dans les localités où ils seraient présents, loin de là ; elles s’emparent de mines et de terres fertiles.

Les minerais continuent d’être extraits, le coltan traverse la frontière et l’argent atterrit dans les poches de réseaux liés à l’armée et au parti au pouvoir au Rwanda.

Ce n’est pas une dérive : c’est une stratégie. Une stratégie qui déstabilise toute une région, dans l’intérêt économique d’un pays.

ÉCRASER LA DISSIDENCE, PEU IMPORTE LES FRONTIERES.

Le Rwanda ne se limite pas à semer le trouble chez son voisin. Son emprise s’étend bien au-delà, jusque dans les rues de Bruxelles (ce qui a pourri les relations avec la Belgique) ou les hôtels de Johannesburg. Paul Rusesabagina, héros du film « Hotel Rwanda », en a fait les frais. En 2020, piégé à bord d’un jet privé, il a été ramené de force à Kigali et jeté en prison sous des accusations fabriquées. Libéré en 2023 sous la pression internationale, son cas n’est qu’un exemple parmi d’autres. Human Rights Watch recense dix ans de surveillance, d’intimidations et d’attaques contre les dissidents rwandais à l’étranger. Certains, comme Patrick Karegeya, ex-chef des renseignements assassiné en 2014 en Afrique du Sud, n’y survivent pas.

La méthode est rodée : traquer, menacer, éliminer toute dissidence. Les familles restées au pays deviennent des otages pour faire taire les exilés. Les pays hôtes, souvent complices par leur silence, laissent faire. Le message est clair: personne n’échappe au contrôle de Kigali.

La récente détention au secret de l’opposante Victoire Ingabire est toujours dans cette même position de répression politique de toute voix dissidente.

LE MONDE REAGIT… MAIS TIMIDEMENT.

Le régime de Paul Kagame joue habilement entre deux visages. D’un côté, il charme les donateurs avec ses missions de paix et ses initiatives climatiques et écologiques. De l’autre, il alimente une guerre criminelle à sa porte. La réponse internationale ? Timide.

En 2025, les États-Unis et l’Union européenne ont sanctionné des figures comme James Kabarebe et Francis Kamanzi pour leur rôle dans le soutien au M23. Un signal, certes, mais bien insuffisant pour démanteler les réseaux qui prospèrent sur ce conflit.

Comment gérer un régime qui est déstabilisateur ? La solution passe par une prise en compte de la réalité géocriminelle.

Les sanctions doivent viser plus haut, identifier et toucher ceux qui s’enrichissent sur le dos des minerais volés. Sinon, elles ne seront qu’un pansement sur une plaie béante. La vraie question est là : le monde se contentera-t-il de mesurettes, ou exigera-t-il des comptes ?

LA PAIX DEMANDE AUSSI L’IMPOSITION DE LA JUSTICE, AU MOINS SOUS FORME DE JUSTICE TRANSITIONNELLE

Il ne suffit pas de retirer des troupes ou de signer des contrats miniers légaux et transparents. Il faut aussi de la justice pour les victimes, des comptes pour les puissants et un démantèlement des réseaux géocriminels qui tiennent la région en otage depuis trop longtemps, j’oserai dire depuis le tristement célèbre « Desk Congo » décrié par le rapport onusien « Kassem », depuis l’aventure de l’AFDL.

Le Rwanda prétend avoir des inquiétudes pour sa sécurité, mais cela n’excuse pas de plonger son voisin dans le chaos. La stabilité chez soi ne peut se bâtir sur l’instabilité des autres.

La géocriminalité du régime de Paul Kagame et de ses hommes de paille ne peut plus rester impunie et les discussions en cours à Doha devront aussi mettre sur la balance ce paramètre dans les discussions avec les rebelles de proxy du M23.

Eugène Diomi Ndongala,

Démocratie Chrétienne, DC

ENGLISH VERSION:

GEOCRIMINALITY WHEN CRIME BECOMES A GEOPOLITICAL WEAPON

Yes, to peace, but organized crime must be dismantled and punished, at the very least through transitional justice.

On June 27, 2025, the Democratic Republic of Congo ççand Rwanda signed a historic agreement, brokered under U.S. auspices, to end the M23 crisis in eastern Congo. Troop withdrawal, disarmament, cooperation.

But behind the diplomatic applause lies a far darker reality that must now be addressed, especially during the ongoing discussions in Doha.

The conflict is riddled with organized crime.

Forget the romantic image of the rebel fighting for a noble political cause, à la Che Guevara, as figures like Nangaa or Joseph Kabila would have us believe.

The M23 is not just a militia; it’s a well-oiled criminal machine.

By seizing mineral-rich territories, the group plunders coltan and gold, turning chaos into a jackpot. They care little for the well-being of Congolese subjected to their violent occupation, even less for unpaid civil servants or good governance.

According to the Atlantic Council, in 2024 alone, M23 exported at least 150 tons of coltan to Rwanda—equivalent to 7-10% of the DRC’s annual global production. The human cost? Over 11,000 deaths in 2025.

While communities collapse, profits soar.

This conflict is no longer an ideological war driven by a supposed quest for good governance; it has been hijacked by criminal interests. Rebels, militias, and even some political actors feast at this bloody buffet. The Doha talks cannot ignore this.

What if crime were a state weapon? This is “geocriminality,” a concept championed by the Global Initiative Against Transnational Organized Crime: the deliberate use of criminal networks to achieve strategic objectives.

Rwanda excels at this. By supporting M23, a proxy rebellion, Kigali secures economic interests and imposes influence over its neighbor while playing the card of innocence and victimhood. UN experts are blunt: thousands of Rwandan soldiers operate in the DRC, and modern weapons flow to M23. Rwanda denies this, claiming it only shares intelligence. But the evidence, like that recently published by NBC, is mounting and undeniable.

Why the double game? Officially, it’s about neutralizing the FDLR, a Hutu militia tied to the 1994 genocide. But the story doesn’t end there. Rwandan forces, hand in hand with M23, don’t just hunt enemies in areas where they’re present; they seize mines and fertile lands.

Minerals keep being extracted, coltan crosses the border, and the money lands in the pockets of networks tied to Rwanda’s military and ruling party.

This isn’t a drift; it’s a strategy. A strategy that destabilizes an entire region for one country’s economic gain.

Rwanda’s reach extends far beyond its neighbor. Its grip stretches to the streets of Brussels (straining ties with Belgium) and the hotels of Johannesburg. Paul Rusesabagina, the hero of Hotel Rwanda, learned this the hard way. In 2020, lured onto a private jet, he was forcibly returned to Kigali and imprisoned on fabricated charges. Released in 2023 under international pressure, his case is just one of many. Human Rights Watch has documented a decade of surveillance, intimidation, and attacks on Rwandan dissidents abroad. Some, like Patrick Karegeya, former intelligence chief murdered in South Africa in 2014, don’t survive.

The method is well-honed: track, threaten, eliminate dissent. Families back home become hostages to silence exiles. Host countries, often complicit through their silence, let it happen. The message is clear: no one escapes Kigali’s control.

The recent secret detention of opposition figure Victoire Ingabire follows the same pattern of repressing dissenting voices.

Paul Kagame’s regime plays a clever dual role. On one hand, it charms donors with peacekeeping missions and climate initiatives. On the other, it fuels a criminal war at its doorstep. The international response? Tepid.

In 2025, the U.S. and EU sanctioned figures like James Kabarebe and Francis Kamanzi for their role in supporting M23. A signal, yes, but far from enough to dismantle the networks thriving on this conflict.

How do you handle a destabilizing regime? The solution requires acknowledging the reality of geocriminality.

Sanctions must aim higher, targeting those profiting from stolen minerals. Otherwise, they’re just a bandage on an open wound. The real question is: will the world settle for half-measures, or will it demand accountability?

It’s not enough to withdraw troops or sign transparent, legal mining contracts. There must be justice for victims, accountability for the powerful, and the dismantling of geocriminal networks that have held the region hostage for too long—dare I say, since the infamous “Congo Desk” condemned in the UN’s Kassem report, or the AFDL’s adventure.

Rwanda claims security concerns, but that doesn’t justify plunging its neighbor into chaos. Stability at home cannot be built on the instability of others.

The geocriminality of Paul Kagame’s regime and its proxies can no longer go unpunished. The Doha talks must factor this into discussions with M23’s proxy rebels.

Eugène Diomi Ndongala,
Christian Democracy.

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