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Le Pari Isolationniste du Rwanda : Une Fuite Stratégique Face au Regard Régional

Depuis des années, la République démocratique du Congo endure une plaie ouverte à ses frontières orientales : l’intervention militaire rwandaise, incarnée par le soutien à des groupes rebelles comme le M23.

Longtemps, Kigali a tenté de draper cette agression dans un voile de légitimité régionale, jouant la carte de la coopération au sein d’organisations comme la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC).

Mais le 7 juin 2025, lors du sommet de Malabo en Guinée équatoriale, ce masque est tombé. Incapable de défendre ses actions face à une RDC déterminée à exposer la vérité, le Rwanda a claqué la porte de la CEEAC, s’enfonçant dans un isolement qui, vu de Kinshasa, ressemble à une capitulation déguisée. Voici comment, pour la RDC, ce retrait marque un tournant, révélant un adversaire acculé, mais aussi les défis d’un conflit loin d’être résolu.

Le théâtre d’une agression devenue indéfendable

Depuis des décennies, le Rwanda alimente l’instabilité dans l’est du pays, une région riche en minerais mais ravagée par la violence. Le M23, ce groupe armé qui, depuis janvier 2024, occupe des villes stratégiques et laisse des milliers de morts dans son sillage, n’est pas un simple acteur local : il est, selon Kinshasa et des rapports cinglants de l’ONU et des États-Unis, une extension de la volonté rwandaise. Kigali nie, bien sûr, mais ses dénégations sonnent creux face aux preuves qui s’accumulent et aux voix qui s’élèvent, de New York à Bruxelles.

Dans ce contexte, la CEEAC était devenue un champ de bataille diplomatique. Pour la RDC, cette organisation régionale devait être un rempart, un espace où confronter le Rwanda à ses actes. Et ça a marché.

Lors du sommet de Malabo, le Rwanda s’est vu refuser la présidence rotative qui lui revenait de droit – une décision que Kigali a dénoncée comme une “instrumentalisation” orchestrée par la RDC. Mais du point de vue congolais, c’est une victoire tactique: en ralliant d’autres membres, Kinshasa a transformé la CEEAC en un tribunal où le Rwanda, incapable de justifier son rôle dans le conflit, a préféré fuir plutôt que de répondre.

L’isolement de Kigali : un aveu implicite

Le retrait de la CEEAC n’est pas un incident isolé. Il s’inscrit dans une spirale où le Rwanda, acculé par les critiques, choisit l’isolement plutôt que de subir des pressions diplomatiques.

En mars 2025, Kigali avait déjà rompu avec la Belgique, l’accusant de parti pris pro-congolais – une rupture spectaculaire qui a vu les diplomates des deux pays plier bagage en quelques heures. Pour la RDC, ce schéma est limpide : chaque fois que le Rwanda doit rendre des comptes, il coupe les ponts. La CEEAC n’est que le dernier domino à tomber.

Kinshasa y voit une forme de victoire. Un Rwanda qui s’isole, c’est un Rwanda qui perd des alliés, des tribunes et donc du poids. La RDC, en mobilisant la CEEAC et en exposant les agissements de son voisin, a forcé Kigali à se replier sur une posture défensive, presque paranoïaque. C’est une fissure dans la façade d’un régime qui aime se présenter comme un modèle de stabilité et de développement.

Une stratégie congolaise qui paie, mais à quel prix ?

La RDC a joué ses cartes avec habileté. En faisant de la CEEAC un levier pour marginaliser le Rwanda, elle a prouvé qu’elle pouvait transformer une organisation régionale en arme diplomatique.

Mais cette victoire diplomatique ne doit pas aveugler le gouvernement congolais. Un Rwanda isolé n’est pas un Rwanda vaincu. En se retirant de la CEEAC et en brûlant ses ponts avec des acteurs comme la Belgique, Kigali pourrait se tourner vers d’autres alliés. Pire, cet isolement pourrait durcir sa posture militaire dans l’est de la RDC, transformant une retraite diplomatique en une escalade sur le terrain.

Vers un avenir incertain

Pour la RDC, l’enjeu est désormais double. D’abord, capitaliser sur cet isolement. Cela signifie intensifier les efforts pour fédérer une coalition régionale et internationale – CEEAC, Union africaine, ONU – afin de condamner et sanctionner l’agression rwandaise.

Chaque pas qui marginalise davantage Kigali est un pas vers une pression accrue pour qu’il lâche prise sur l’est du Congo.

Ensuite, anticiper les contrecoups. Un Rwanda dos au mur pourrait chercher à rétablir son influence par des moyens détournés, que ce soit en renforçant ses proxies comme le M23 ou en tissant de nouvelles alliances.

Le retrait de la CEEAC, vu de Kinshasa, est une preuve éclatante que le Rwanda ne peut plus masquer son rôle dans le conflit qui frappe l’Est de la RDcongo. C’est un aveu d’échec, une fuite face à une RDC qui, malgré ses failles, gagne du terrain sur la scène diplomatique.

Eugène DIOMI NDONGALA

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MISE A JOUR : Le Congo Brazzaville, résilie son contrat de terres avec le Rwanda après une semaine des discussions pour le renouvellement de ce contrat; 95% des députés congolais ont voté non.

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