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« LORSQUE LE DROIT EST IGNORE, C’EST LE CHAOS QUI DOMINE »J. Ndjoli

Processus électoral dans l’impasse : Jacques Ndjoli – « Lorsque le droit qui doit lutter contre le chaos est ignoré, c’est le chaos qui domine »


Du non-respect de la Constitution en vue d’organiser les élections dans les délais constitutionnels, de l’irresponsabilité de la CENI de n’a voir pas convoqué le corps électoral le 19 septembre. Voilà des questions que le sénateur Djoli a abordé dans cet entretien à bâtons rompus.

 Les 19 et 20septembre de cette année, la RDC était en ébullition. Quelle est votre lecture des faits?

II faut d’abord regretter ces morts douloureuses violentes mais totalement inutiles, à mari avis, parce que le but du droit constitutionnel, c’est de domestiquer la violence politique et de réglementer le jeu politique dans des règles qui s’imposent à tous. Et lorsqu’on prend les risques de négliger les règles, de prendre des attitudes contraires aux prescrits de la Constitution, lorsqu’on déstructure le corps politique et que le droit qui doit lutter contre le chaos est ignoré, c’est le chaos qui domine. Malheureusement, c’est ce que nous avons vécu les 19 et 20 septembre.

 La Constitution reconnaît au peuple le droit de manifester publiquement. Qui serait responsable de ce qui est arrivé lei 19 et 20septembre?

Dans notre Constitution, la liberté de manifestations est consacrée. Et les pouvoirs publics ont l’obligation d’encadrer toutes les expressions populaires sur les voies publiques que ça soient sur des lieux fermés ou sur des axes mobiles. Nous regrettons que dans ce régime d’information ou déclaratif, l’Hôtel de ville a pris des dispositions à autoriser la marche et en plein processus de marche, on a appris que la marche est interdite et dans ce cas là, dans le principe de maintien de l’ordre public, on ne tire pas sur la population et surtout avec des armes de guerre. On encadre la population pour éviter justement le débordement. Ainsi nous en sommes en face d’une police qui n’a pas pu faire ce qu’elle devait faire mais son travail a été fait par les forces armées dotées des armes de guerre et qui les ont utilisées de manière abusive et de façon disproportionnelle. Donc, il faut rétablir les responsabilités sur ce désastre parce que même aujourd’hui, le nombre de morts reste inconnu. Certains parlent de 37, de 12 et d’autres encore parlent de 100. Il faudrait un rétablissement des faits et de responsabilité parce qu’au-delà de ceux qui ont été autorisés à user de leurs droits à manifester, il y a eu apparemment des infiltrés et surtout l’utilisation de la force publique pour aller s’attaquer au siège des institutions. C’est ce qui est très grave parce que la violence de l’Etat est une violence abjecte voire inadmissible.

 La communauté internationale a encouragé Edem Kodjo à poursuivre les travaux du dialogue qui se tient à la cité de l’UA. Qu’en dites-vous?

On est arrivé aux évènements des 19 et 20 septembre par la faute de Kodjo. Nous avons eu à le lui dire que l’attachement du peuple congolais à la démocratie, au respect de la Constitution, à un Etat de droit, c’est un attachement qui va au-delà de son subconscient. On s’est amusé à dire qu’on va enrôler pendant 16 mois, on va consulter la Cour constitutionnelle, mais on oublie que le droit constitutionnel, c’est d’abord un droit de subconscient, un droit collectif. Et le droit de vote, c’est le droit le plus puissant qu’un homme puisse avoir.

 Pourquoi la Céni n’a pas convoqué le corps électoral dans le délai constitutionnel?

Au cœur de la crise actuelle, il y a certes la volonté du pouvoir politique actuel de s’éterniser au pouvoir par la monopolisation et la confiscation des moyens d’Etat. Malheureusement, la Majorité a instrumentalisé la Céni qui, depuis juin 2013, s’est évertué à opérer des manœuvres dilatoires, à utiliser de mauvaise foi les contraintes ou des contingences logistiques pour justifier cette volonté de faire un coup contre la Constitution en douceur en se servant de la Céni. La Céni savait depuis plus de 3 ou 5 ans qu’il faudrait convoquer le corps électoral le 19 septembre 2016. C’est la Céni qui va prendre l’option de parler d’un enrôlement d’une refonte totale unilatérale de l’ensemble du fichier en se sentant même capable d’aller enrôler les Congolais de la diaspora. Ce qu’elle n’a pas pu faire depuis 2006 voire 2003. C’est vraiment de la mauvaise foi et de manière intentionnelle que la Céni se laisse embarquée ou embrigadée par la Majorité pour réussir son coup, c’est-à-dire contourner les verrous fixés par la Constitution.

 D’après vous, quelles seraient les conséquences de la refonte totale du fi- chier électoral?

Prévoir une situation d’enrôlement de 16 mois et 1 jour en prenant au moins délibérément 6 mois pour l’appel d’offres, 3 mois pour un test pilote ou 4 mois, ça fait 10 mois et ensuite dire qu’on va à l’enrôlement sur 4heures en fonction des 3 mois, c’est-à-dire qu’on est même au-delà de 16 mois voire 22 mois. Et si ensuite, on se donne le droit de dire que nous n’avons pas de calendrier électoral, c’est-à-dire le refus de publier le calendrier conformément à la Constitution, est un acte volontaire de violer la Constitution, de ne pas tenir compte des délais de convocation du corps électoral qui sont des contingences, des impérativités que la Céni ne peut pas contourner, comme si nous étions dans une République bananière.

 Dans le Projet d’accord politique à signer à la clôture des assises de la cité de l’UA, la date de l’élection présidentielle n’est pas fixée. Qu’en pensez- vous?

La question n’est pas de dire que c’est en 2018, ce qui est apparemment la date probable retenue dans le calendrier de la Céni. Toutes ces manœuvres dilatoires démontrent la volonté de la Céni de ne pas rester dans les délais constitutionnels, les délais qui sont imposés. Dire qu’on va aller en 2018, 2019 ou 2020, c’est une évidence pour cette structure qui fait le jeu malveillant de la Majorité avec des conséquences incalculables de renforcer des frustrations et créer des conditions d’une explosion sociale et politique dans notre pays.

 Le Gouvernement a pris rengagement de financer les prochaines élections sur fonds propres. Croyez-vous en ce défi?

Voilà encore une sorte de mensonge d’Etat. Depuis toujours, le gouvernement s’est inscrit dans la logique d’asphyxier la Céni pour l’empêcher de fonctionner, donc d’organiser les élections tout en restant dans les délais constitutionnels. Cette promesse du gouvernement n’est une fois de plus que du bluff.

 Le gouvernement s’accroche à la CENI pour justifier le glissement, alors que le peuple s’accroche à l’alternance démocratique. Qu’adviendra-t-il le 20 décembre 2016?

Le gouvernement se livre à une épreuve de force inutile en se servant de ce qu’un collègue appelle « le triangle du glissement », la Majorité automatique que le gouvernement dispose à l’Assemblée nationale, la Cour constitutionnelle pour avoir parfois des arrêts incongrus afin de justifier le contournement et la Céni pour utiliser des éléments techniques susceptibles d’asseoir ce que j’appelle une sorte de « coup d’Etat ». Donc, tous ces éléments font que la Constitution, qui est un contrat entre le gouvernement et les gouvernés, cette charte fondamentale, est rompue. Donc, on livre la République à être une poudrière en refusant de respecter la Constitution qui est la garantie de la stabilité et de la paix. Et lorsque vous violez la Constitution, vous rompez ce contrat de confiance avec le peuple, vous créez votre illégitimité de pouvoir

On va assister à des exactions politiques inorganisées, des guérillas par-ci par-là, des rébellions à l’Est, avec risque que la République se transforme en une zone inorganique des tirs libres et où ne peut prospérer que la violence débridée.

PROPOS RECUEILLIS PAR MÉDARD MUYAYA

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