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DISCOURS-PROGRAMME DE Mme SUMINWA: BANALISATION DE LA CRISE ECONOMIQUE, POLITIQUE, SECURITAIRE

Après un « combat de coqs » entre des membres du bureau de l’Assemblée Nationale, les congolais ont enfin eu droit à la présentation du programme du gouvernement et des animateurs de l’exécutif porté sur les fonts baptismaux par Mme Suminwa, Première Ministre de la RDCongo.

Du point de vue formelle, le caractère éléphantesque du gouvernement qui vient d’être investi par l’Assemblée Nationale, cadre mal avec la volonté affichée de réduire le train de vie des institutions.

Le grand nombre d’anciens ministre du précédent gouvernement Sama Lukonde 1 et 2 ne permet pas à un vent nouveau de souffler sur cet exécutif.

Ce n’ est pas par hasard que certains observateurs aient surnommé cet exécutif le « Sama Lukonde 3 ».

En ce qui concerne les soi-disant piliers de l’ action gouvernementale, c’est surtout la hiérarchisation des objectifs qui étonne.

En effet, plutôt que trouver, à la première place des « piliers » de ce programme, le retour à la paix et la lutte contre  » la prédation destructive » des élites qui se donnent un droit absolu de « cueillette » sur l’argent du contribuable congolais, on nous a énuméré un série d’objectifs (appelés piliers) qui peuvent être le résultat d’une bonne gestion économique mais qui ne sont pas directement réalisables, sans un véritable redressement macro-économique de la RDC.

En effet, la relance de l’emploi, contrairement à ce que dit Mme Suminwa, ne pourra jamais être obtenue par la « découverte de niches » dans l’actuel panorama socio-économique d’ une « économie en crise ».

L’emploi pourra être augmenté par une relance de l’investissement productif, dans l’industrie (toujours embryonnaire, en RDC), de l’agriculture extensive ou bien d’une politique Keynésienne de travaux publics.

Dans un pays, comme la RDCongo, descendue, selon les dernières données de son PIB (produit interne brut)publiées par le FMI (Fond Monétaires International), à la quatrième place des pays les plus pauvres au monde, invertir l’ordre des priorités est une grave erreur que les congolais ne peuvent plus se permettre.

Que dire sur la situation de crise-sécuritaire qui frappe la RDC?

Elle est à peine effleurée, par Mme le Premier Ministre, avec une certaines légèreté, alors que sans pacification de la RDC, par un large dialogue politique inclusif, les objectifs de son gouvernement seront un vague inventaire de bonnes intentions.

C’est quand même très grave qu’aucune action sérieuse ne soit envisagée pour venir en aide aux 7,5 millions de déplacés de guerre qui ont vécu, jusqu’à ce jour, avec 150 francs par AN, par personne, mobilisés par le gouvernement précèdent!

La même analyse est valable pour la volonté affichée de mettre en exergue la protection du pouvoir d’achat des congolais, comme « pilier » de l’action du gouvernement.

Plus qu’un objectifs en soi, ce pilier du gouvernement pourra être sérieusement atteint seulement dans un contexte de relance de la production agricole interne (pour atteindre l’autonomie alimentaire) mais aussi de l’industrialisation, qui pourrait équilibrer notre balance des payements et rendre notre économie moins dépendante des importations en devise et, par conséquent, notre monnaie plus stable face au dollar.

La promotion du sport, de la culture ou bien la couverture sanitaire voulue « universelle » sont des objectifs nobles bien que toujours dépendants du rétablissements des équilibres macro-économiques et une lutte, sans ménagement, contre la « prédation destructive » des dirigeants qui s’approprient de portions énormes du budget national, rendant impossible la mise en place des reformes essentielles dans l’armée, la fonction publique, la justice et l’administration, sans lesquelles le service publique ne pourra jamais être efficace: n’en déplaise à Mme Suminwa.

L’impression générale qu’a donné le ton excessivement léger et optimiste du discours programme de l’exécutif, est celle d’une responsable qui ne veut pas assumer la gravité de la situation qui accable la RDC, en ce moment.

Les crises économique, sécuritaire, politique et humanitaire ont été tout simplement banalisées, certainement pour ne pas accabler le précédent gouvernement Sama-Lukonde, devenu légendaire pour sa passivité face aux graves problèmes qui ont secoué le Congo Démocratique, ces dernières années.

Cela n’est pas étonnant, vu qu’un grand nombre des actuels ministres siégeaient dans le précédent gouvernement, dont Mme Suminwa elle-même.

Cette tendance à la banalisation de la situation réelle de crise économique et politique de la RDC n’est pas étonnante et on la retrouve dans les chiffres gonflés des budgets nationaux à venir.

Prévoir une augmentation du budget qui serait alimentée exclusivement par l’assiette fiscale (actuel) et la coopération budgétaire extérieure, apparait irréaliste, sans une pacification de la RDC et une relance, par l’investissement, de la production interne, la guerre ayant la fâcheuse tendance à absorber toutes les maigres ressources disponibles.

Sans oublier le taux d’intérêt moyen du portefeuille de la dette publique qui a été contractée entièrement par le précèdent gouvernement et qui pèse aussi lourdement sur le budget national.

Ne pas mettre en exergue la lutte contre la corruption c’est une négligence qui risque d’anéantir les efforts de la praxis gouvernementale, même si les « fameux piliers » de son action étaient placés dans le bon ordre hiérarchique.

Voilà pourquoi je crains que les faiblesses des précédents gouvernements Sama-Lukonde 1 et 2, puissent se répéter dans le gouvernement de Mme Suminwa, d’ailleurs elle même issue de cet exécutif.

Nier la gravité de la situation, par un diagnostique complaisant des maux qui rongent le pays, n’est jamais une bonne attitude.

Dans cette optique, j’invite Mme Suminwa à « donner une chance à la paix en RDC » et à ajouter, aux « piliers » de l’action de son gouvernement, la « lutte contre la prédation destructive » qui paupérisa toute la nation et qui risque de plomber sérieusement l’action de son exécutif, si la corruption, les détournements, les surfacturations ainsi que les excédents budgétaires alloués aux institutions ne sont pas immédiatement maitrisés.

Eugène Diomi Ndongala,

Démocratie Chrétienne

Kinshasa, 11/06/24